Fantômes Le souvenir est fragile. J’ai peur de cligner des yeux une fois de trop et qu’il soit balayé par le souffle de mes paupières. Je photographie et j’oublie, je n’arrive pas à lutter. Cette série est comme une plongée dans ma mémoire en ruine, où je donne à voir des images mentales.
Il
ne s’agit pas de raconter un moment passé mais de montrer comment je
l’ai oublié, sans combler le vide. C’est le caractère mouvant de la
mémoire qui m’intéresse ; comment elle floute les détails, dilue les
regards et efface les visages.
Ici rien n’est fixe, tout est incertain. Il n’y a presque plus de frontières entre imagination et mémoire. Le souvenir est vieux, et quand il est trop lointain, quand il est trop tard, je m’accroche aux réminiscences.
Que les gens disparaissent est au fond moins surprenant que de les voir apparaître soudain devant nous, proposés à notre coeur et à notre intelligence. Ces apparitions sont d'autant plus précieuses qu'elles sont infiniment rares. La plupart des gens sont aujourd'hui si parfaitement adaptés au monde qu'ils en deviennent inexistants.
Je suis là fatiguée lasse de tout ce qui n'a pas eu lieu Rien ne m'apartient ni les êtres ni les choses Rien ne laissera trace de moi si ce n'est traces de craie sur le tableau noir.