jeudi 9 juillet 2009
le charmeur de serpents
©Wynn Bullock - girl on beach - 1968
Ce n'est pas la main qui a fait un homme du singe, ce n'est pas un embryon de cerveau et ce n'est pas non plus l'âme: il y a des chiens et des ours qui agissent plus intelligemment et de manière plus morale que l'homme. Et ce n'est pas non plus parce qu'il a maîtrisé la force du feu: tout cela est arrivé bien après que se soit réalisé la condition essentielle de sa transformation. Un jour, dans d'autres conditions, semblables pour tous, l'homme s'est révélé le plus solide, le plus endurant sur le plan physique, de tous les animaux. [...] Un cheval ne tient même pas un mois dans les conditions de vie à Kolyma en hiver, exposé au froid de l'écurie et soumis à un travail pénible et prolongé en plein gel. [...] Mais l'homme, lui, peut vivre. Peut-être vit-il d'espoir ? Mais c'est qu'il n'a aucun espoir. Si ce n'est pas un imbécile, il ne peut pas vivre d'espoir. Voilà pourquoi il y a tant de suicides. Mais l'instinct de conservation, le fait de s'accrocher à la vie et de s'y accrocher justement sur le plan physique - cet instinct auquel est également subordonnée sa conscience -, voilà ce qui le sauve. Il vit de ce qui fait vivre la pierre, le bois, l'oiseau et le chien. Mais il s'accroche plus à la vie. Et il est plus endurant que tous les animaux.
Varlam Chalamov - Récits de Kolyma "le charmeur de serpents"
It is not the hand which made a man of the monkey, it is not an embryo of brain and it is not either the soul: there are dogs and bears who act more intelligently and in a more moral way than the man. And it is not either because he mastered the strength of the fire: all this arrived after it was realized the essential condition of his transformation. One day, in other conditions, similar for all, the man showed himself the most solid, the toughest on the physical plan, of all the animals. [...] A horse does not last even one month in the living conditions of Kolyma in winter, exposed to the cold of the stable and subjected to a hard and prolonged work in full frost. [...] But the man, him, can live. Maybe he lives on hope? But it is that he has no hope. If he's not an idiotic, he cannot live on hope. That's why there are so many suicides. But the instinct of self-preservation, the fact of hanging on to the life and of hanging on to it exactly on the physical plan - this instinct to which is also subordinated its consciousness-, here is what what saves him. He lives on what make live the stone, the wood, the bird and the dog. But he hangs on more to the life. And he is tougher than all the animals.
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